
En Chine, la vie quotidienne est désormais dominée par les paiements numériques. L’utilisation d’applications comme WeChat Pay et Alipay est si répandue que l’argent liquide est devenu quasiment obsolète. Cette transformation fulgurante, bien que synonyme de modernité, révèle des défis insoupçonnés pour une partie de la population et soulève des questions fondamentales.
⏱️ Pas le temps ? Voici l’essentiel à retenir de cette actualité
- 📱 La Chine a massivement adopté les paiements numériques, rendant l’argent liquide quasi obsolète et dominant le quotidien.
- 👵 Cette transition pose des défis importants, notamment pour les personnes âgées, et soulève de sérieuses questions sur la vie privée des citoyens.
- ⚖️ La puissance accrue des géants de la Tech a suscité des réactions du gouvernement, qui cherche à reprendre le contrôle, y compris via le yuan numérique.
La vie quotidienne à l’ère du tout-numérique
En Chine, vouloir régler un taxi en espèces relève désormais du défi, les refus étant monnaie courante. Harold Thibault, correspondant du journal Le Monde, a souligné cette transformation : l’argent physique est délaissé au profit des paiements électroniques via les omniprésentes applications WeChat et Alipay. Ce constat est partagé par de nombreux habitants.
Des commerçants pékinois ont confié que les rares utilisateurs d’espèces sont souvent des personnes de plus de 80 ans. Un tel scénario était impensable il y a dix ans. Bien que ce virage se soit fait rapidement, certains aînés expriment leur regret. L’un d’eux, désabusé, confie : « Tout va trop vite. Mon fils et même mon petit-fils de 8 ans m’ont installé WeChat et Alipay, mais c’est trop compliqué. » Face à ces nouvelles technologies, il doit solliciter sa famille pour des tâches quotidiennes simples, comme commander un taxi. D’autres usagers, à l’inverse, saluent la facilité d’usage de ces services numériques.
L’ombre de « Big Brother » et la quête de contrôle
Selon Le Monde, WeChat et Alipay opèrent comme de véritables services bancaires pour la population. Pendant ce temps, les banques traditionnelles, toutes étatiques, n’ont pas su s’adapter ni proposer de fonctionnalités concurrentielles. Cette puissance démesurée des sociétés technologiques n’a pas toujours plu aux autorités.
Le cas de Jack Ma, fondateur d’Alibaba, est emblématique. Ses critiques envers le régulateur l’ont rendu la cible du gouvernement. L’introduction en Bourse de son entreprise fut bloquée. Après une disparition de plusieurs mois et un exil, il a été reçu par Xi Jinping, mais son histoire a servi de sévère avertissement. Consciente des lacunes étatiques face au privé, la Banque Populaire de Chine a lancé le yuan numérique, ou renminbi digital, pour les paiements dématérialisés. En 2022, le régime a annoncé 260 millions de comptes ouverts. Pourtant, cette monnaie digitale peine à s’ancrer dans les habitudes populaires.
Comme l’expliquait François Lenglet sur RTL en 2021 : « La fin du cash, c’est la fin de l’anonymat. L’État, ou la banque centrale, sait tout de vous, dans les moindres détails. L’argent liquide, c’est la protection de la vie privée, alors que la monnaie électronique, c’est le rêve de Big Brother. »
Un modèle chinois aux leçons mondiales
Par ailleurs, cette initiative soulève des questions flagrantes de confidentialité. Chaque transaction numérique laisse une trace, permettant aux autorités de connaître en détail les habitudes de consommation des citoyens. Pour beaucoup, la disparition de l’argent liquide représente une érosion des libertés individuelles, transformant chaque achat en une donnée consultable.
Ce modèle chinois diffère notablement des approches occidentales. La Banque Centrale Européenne, par exemple, travaille sur un euro numérique. Cependant, les autorités européennes ont maintes fois insisté : il ne s’agit en aucun cas de remplacer l’argent liquide. La coexistence du numérique et du physique est privilégiée, soulignant une volonté de préserver la vie privée et le choix des citoyens.